L'Europe en capsaille
Une parabole poétique qui parle du suicide de l’Europe (la montée du nazisme en 1933) et de l’exil d’un artiste (Kurt Schwitters). Une magnifique épopée d’une douloureuse actualité.
«Que nous dit aujourd’hui le croisement de deux bateaux au large d’Ouessant, l’un venant d’Allemagne à l’aube de la tourmente nazie, l’autre parti de Douarnenez ?
Sur le paquebot, l’artiste Kurt Schwitters profite d’une croisière, histoire de se changer les idées, tandis qu’Hippolyte Celton, aux commandes de son dundee chargé de maquereaux, s’apprête à subir une tempête.
L’après-midi, il y a eu ce fameux match France-Allemagne.
Sur la côte, un observateur préoccupé : Saint-Pol-Roux.
Le poème, révélant des faits parfois troublants, vise une reconstitution selon plusieurs points de vue, élaborée à partir d’éléments d’archives, de témoignages et de repérages. [Patrick Beurard-Valdoye]»
Patrick Beurard-Valdoye est un poète enquêteur : chacun de ses livres est le journal de bord d’une errance au cours de laquelle l’auteur s’immerge totalement dans un site et construit son récit à partir d’écoutes, de documents retrouvés, de paroles libérées… il n’a de cesse de trouver le manuscrit enfoui, la lettre oubliée, le journal local d’époque… il part à la rencontre des souvenirs, fouille les mémoires, hante les archives des sous-préfectures… de ces informations éparses, il tire une substance en fonction du principe des coïncidences. Une histoire se dessine, devient matière vivante d’écriture. Les héros, obscurs figurants de l’histoire ou gloires internationales, se croisent, les époques se télescopent et les événements se répondent selon une logique qui échappe aux manuels d’histoire… Une écriture naît, une écriture-mémoire, véritable créole beurardien où la langue charrie patois local, français actuel, et langue en devenir.
«Capsaille» est un terme de marine qui signifie « naufrage ». Une Europe en capsaille est une parabole à deux lectures qui mêle grande et petite histoire. À travers un fait divers oublié (la collision et le naufrage d’un bateau de pêche breton et d’un bateau de croisière allemand), c’est le suicide de l’Europe qui nous est raconté (avec la montée du nazisme), mais aussi la désespérante errance d’un artiste ne cessant de fuir (dès 1933, Kurt Schwitters doit faire face aux premières persécutions nazies. Il voit ses œuvres décrochées des musées allemands. En 1937, quatre de ses tableaux figurent à l’exposition L’Art dégénéré).