Voyage à la page
Ce qu'affiche ce titre, c'est une poétique. Chaque page est fragment d'un voyage qui à la fois se poursuit et se multiplie comme par effet de scissiparité. Le lecteur est assailli petit à petit par tout ce qui fait le voyage : les mouvements, les corps, les odeurs, les matières, les sons de la nature et de la ville, les sonorités étrangères, les langues. C'est la quintessence même de l'expérience qui est proposée ici, à chaque page il faut réapprendre à être face à la nouveauté : désapprendre pour réapprendre. La force de ce texte est peut-être le plaisir qui naît de la confrontation permanente, ponctuée par des blancs, des syncopes et des agglutinations charnelles, entre multiplication, brièveté, rapidité - et la lenteur fondamentale des images élégiaques que dispense ce poème en prose. Ce voyage est celui-là même de l'écriture. Michel Robic publie dans la revue Tel Quel, entre autres, dès ces débuts en écriture. Musicologue, il est spécialiste de la musique classique de l'Inde du Nord. Ce roman permet la redécouverte d'un auteur majeur des avant-gardes des années 60.