Une chambre au paradis

Le livre s'ouvre en Égypte, en 1993 : un groupe de neuf terroristes islamistes s'apprête à perpétrer un attentat contre le temple de Louxor. Parmi eux Jochen Sawatsky, un jeune Allemand converti à l'islam. Écrite à la première personne du singulier, la première partie du roman met en scène la marche d'approche, les préparatifs et la mise en échec de l'attentat ;­ les terroristes sont au dernier moment interceptés par la police. Christoph Peters tente de saisir, en se glissant dans la peau de son personnage, quelles ont été les raisons de sa conversion, pourquoi, malgré les réticences d'Arua, la jeune fille égyptienne dont il est amoureux, il s'est engagé dans la lutte armée, acharné à vaincre tous les obstacles. Un monologue qui interroge de manière saisissante les sources du fanatisme religieux et de l'aveuglement. Interrogation qui se poursuit dans la deuxième partie du livre, consacrée, elle, à la confrontation de Sawatsky, un des seuls survivants de l'opération, avec l'ambassadeur d'Allemagne au Caire. Claus Cismar, qui dans les années soixante fut militant d'extrême gauche dans la RFA d'alors, essaie de comprendre ce qui a transformé un jeune Allemand, un peu perdu, en meurtrier. Mais le représentant de l'ordre qu'est devenu l'ambassadeur est forcé, par l'exposé des motivations de son interlocuteur, de remettre en cause sa propre vie et ses choix : le cas de Sawatsky le met devant la question très inconfortable de la pureté de ses actes. Comment et pourquoi a-t-il trahi les idéaux de sa jeunesse pour devenir un rouage du système que naguère il avait combattu ? Admirablement tenu, ce roman pose avec intelligence et efficacité, à travers le portrait d'un islamiste radical, la question du basculement entre le bien et le mal, la foi et le fanatisme. Son auteur, qui est une des figures émergentes de la jeune littérature allemande, a travaillé neuf ans à son projet.