Notre-Dame de Paris - o reine de douleur
« Notre-Dame est une cathédrale du Christ mais chevet au Levant et tours au couchant elle est également un temple solaire. Chaque jour, Paris changeait. Le ciel imprimait d imperceptibles nuances sur la ville. Paris prend mieux la lumière d'orage que la clarté d'azur. Tout ciel tragique grandit une ville. La capitale repose «sous le commandement des tours de Notre-Dame » comme l'écrivait Péguy. »
Sylvain Tesson entretient une relation forte et intime avec Notre-Dame, cette « île de pierre à explorer ». Il l'a maintes fois escaladée en voisin, y emportant des vers de Péguy. Pour lui, quiconque passera une nuit dans les coursives de ce vaisseau gothique sera métamorphosé. Il a cherché dans la nuit les traces de ses prédécesseurs, l'histoire gravée dans les murs. Plus tard, en convalescence d'un terrible accident, il s'est astreint chaque jour à gravir les escaliers en colimaçon de l'édifice.
« Cinq mois auparavant, j'étais tombé sur mon ombre, mon corps était déchu. Je le montais vers le ciel pour le fortifier. »
Le monde entier pleure la tragédie du 15 avril parce que Notre-Dame symbolise la chrétienté au coeur large, un monument de l'âme, un refuge pour les croyants et les non-croyants, les vagabonds, les réprouvés et les poètes. « Et si l'effondrement de la flèche était la suite logique de ce que nous faisons subir à l'Histoire ?
L'oubli, le ricanement, la certitude de nous-même, l'emballement, l'hybris, le fétichisme de l'avenir... et un jour, les cendres. Peut-être un peuple va-t-il se porter au chevet de sa reine ? Peut-être va-t-il se souvenir qu'il n'est pas né hier. Mais peut-être rien ne changera-t-il et continuerons-nous à nous espionner les uns les autres, à nous haïr, à nous conspuer. Alors on se dira que la flèche a bien fait de se retirer. »