Les céramiques de Gauguin
En 1886, année précédent son premier départ pour Tahiti, Paul Gauguin, en grande partie motivé par des raisons alimentaires, entreprend une série de céramiques, d’abord décoratives puis assez rapidement sculpturales et fortement expressives. Il en réalisera une centaine entre ses différents voyages en Océanie, en Martinique et à Pont-Aven. Au seuil de l’art moderne, elles préfigurent un renversement du rapport entre l’art et l’artisanat, lequel n’est plus de sujétion, mais de complémentarité, le pouvoir créateur de la main trouvant son énergie dans les ressources même du matériau. Cette reconnaissance sera déterminante pour son oeuvre même, mais aussi pour l’art du XXème siècle autour des Nabis et du primitivisme. Ainsi, son identification à Oviri («le sauvage»), personnage qu’il invente, s’incarne magistralement dans la céramique et au geste originel mêlant la main à la terre. En outre, elles éclairent d’un jour totalement nouveau l’histoire de la céramique contemporaine.