L'araignée d'eau
"J'ai pour L'Araignée d'eau, je l'avoue, une admiration particulièrement vive. Ce livre n'a jamais quitté mon souvenir depuis que je l'ai lu, et je le considère comme l'une des productions les plus achevées que nous ait données la littérature française dans le domaine du fantastique. Plus que tout autre texte, sans doute, il est révélateur de l'étrange sensibilité et du singulier talent de Marcel Béalu... "L'innocence et la fièvre sont les deux plus puissants ressorts qui par l'écrivain soient mis ici en oeuvre... Cette innocente promenade, qui si terriblement s'achève, est conduite, disons le mot, à la perfection. L'émotion à tel point se communique que le lecteur, à tête reposée, en vient à se demander s'il n'y a pas plus que du rêve dans cette histoire impossible, et si l'origine de tout cela ne se confond pas avec quelque réalité. Quant à la fièvre, sensible dès la première page, sa courbe jusqu'à la fin est ascendante, et par sa violence elle ordonne un dénouement qui ne peut être que tragique. Elle fait son chemin, dans la conscience du lecteur aussi, par les voies de la sensualité ou, comme on dit un peu trop facilement aujourd'hui, de l'érotisme. Sous ce rapport, je ne connais pas beaucoup de récits qui soient doués d'un charme aussi trouble et insinuant que L'Araignée d'eau. Quoique les limites de la décence y soient toujours respectées, ce petit ouvrage est l'un des plus immoraux que je sache ; ce qui n'est pas, on s'en doute, pour nuire à mon admiration."