Un Algérien, Maurice Laban
L'histoire de Maurice Laban, c'est d'abord la tragédie d'un homme qui prit part à quelques-uns des combats marquants de ce siècle. On ignore, le plus souvent, ce qu'était la réalité de la domination coloniale française dans ce Sud algérien où il naît en 1914 et contre laquelle, très tôt, il entre en rébellion. En 1936, il participe à la fondation du Parti communiste algérien et, bientôt, il s'engage en Espagne dans les Brigades Internationales dont il devient un officier, blessé gravement à deux reprises au combat. Revenu en Algérie, il prend part à la lutte clandestine contre le régime de Vichy dès 1940 et il est condamné aux travaux forcés à perpétuité par la Section spéciale du Tribunal militaire d'Alger. Il affirme alors la nécessité de l'indépendance de l'Algérie. Communiste fidèle jusqu'à l'abnégation, mais exprimant ses positions, il est mis à l'écart, victime des nombreux aléas de la politique officielle des Partis communistes français et algérien. Pourtant, dans le Sud algérien, Biskra, les Aurès aux côtés de l'avocat Laïd Lamrani, il demeure une figure très populaire parmi les Algériens, à la tête de la puissante organisation communiste de la région. En novembre 1954, la tragédie va se nouer. Pris en contradiction entre sa volonté de s'engager dans la guerre d'indépendance qui éclate et l'attentisme du Parti communiste algérien, il est finalement tué au maquis, dans la région d'Orléansville, au mois de juin 1956, aux côtés de l'aspirant Henri Maillot qui avait déserté de l'armée française avec un camion d'armes. Désigné comme traître par une grande majorité d'Européens d'Algérie et par les autorités civiles et militaires françaises, il se considérait, lui, seulement comme un Algérien. Jean-Luc Einaudi restitue avec vigueur et clarté cet itinéraire tragique qui fait partie à la fois de l'histoire de la France et de celle de l'Algérie.