Mudrâ : L'esprit primordial
Cet ouvrage est singulier. C'est un des rares livres à nous montrer le moment où Chögyam Trungpa est en train de devenir le maître de la folle sagesse qui fera feu de tout bois pour transmettre la flamme de l'éveil. Transmission difficile car Chögyam Trungpa décèle qu'en Occident ceux qui s'adonnent à la spiritualité ne font le plus souvent que fuir le lieu véritable qu'il nous faut apprendre à habiter, le lieu de notre vie réelle, l'espace de notre existence propre. Il refuse de faire de la parole du Bouddha une marchandise et connaît à la fin des années soixante une solitude dont témoigne plusieurs textes de ce volume. Suite à un accident de voiture, il écrit le poème "Tant pour l'amour" ; c'est le thème central de ce livre : un abandon dans l'amour. L'amour implique de s'ouvrir et de célébrer tout ce qui est. On trouve également dans Mudra deux points décisifs de l'enseignement de C. Trungpa : la nécessité de mettre au premier plan l'accent sur la pratique de la méditation et l'importance de dessiner un chemin permettant à chacun de se repérer et de se diriger, comme le montre, sur ce second point, le dressage du taureau sauvage provenant de la tradition Zen. La méditation, pour lui, ne vise pas à simplement calmer l'esprit, mais vise à laisser l'espace inconditionnel se déployer. Plus radicalement même, cette pratique ne fait sens que dans la perspective ultime du Maha Ati selon laquelle il n'y a rien à acquérir, rien à changer, où l'esprit et l'espace ne seront plus distincts.