Sauver le monde
En 1805, Isabel Sendal y Gomes dirige un orphelinat à La Corogne dans le nord de l’Espagne. Sa vie va être bouleversée par l’arrivée de Francisco Xavier Balmis, médecin chargé par le roi d’Espagne de faire le tour du monde pour vacciner les populations des colonies contre la variole.
Pour ce faire il a besoin de trente-deux orphelins porteurs de la vaccine. Isabel, qui a été défigurée par la variole, va s’engager dans cette lutte contre ce mal qui a, dès la conquête de l’Amérique, décimé 85% des populations indiennes. Isabel s’embarque à bord de la goélette pour s’occuper des orphelins. Cette femme sans fortune ni famille découvre dans l’immensité de sa mission une raison de vivre: sauver le monde du fléau.
Isabel a existé mais elle est ici la création d’une romancière en panne devant la commande de son éditeur : une saga familiale. Alma est professeur dans une université, née en République dominicaine, elle souffre du blues de la cinquantaine, elle se sent hors du monde. Son mari part tester un vaccin contre le sida dans une région pauvre de Saint-Domingue et là, alors qu’il entamait un projet de développement durable, il est pris en otage.
Alma, désespérée, se rend sur place en se cherchant elle aussi une mission comme ce personnage de fiction qui la hante et va devenir son seul soutien dans cette épreuve. Cependant ces deux femmes sont marquées par ce décalage entre leur idéalisme et leur sensation de ce qu’a de dérisoire leur effort face à l’étendue des dégâts.
Avec une grande habileté dans la construction des différents plans de la narration et un vrai talent de conteuse d’histoires haletantes qu’on ne peut abandonner, Julia Alvarez écrit un roman passionnant qui parle de dérision, de courage et du rapport qu’entretient un créateur avec ses personnages. Le lecteur vit deux aventures parallèles prenantes en compagnie de deux femmes remarquables aux prises avec le monde.