Cours sur la volonté
Dans un livre, on ne cherche pas à expliquer, mais à s'expliquer : on écrit pour convaincre les doctes et vaincre les opinions reçues ; on utilise tous les arguments de raison, sans renoncer aux plus obscurs, aux plus ardus ; on ne songe en fait souvent qu’à quelques interlocuteurs proches ou opposants, tous admirés, car très savants et très compétents, mais parfois un peu retors ; on n’hésite donc pas à un style soutenu, technique, lourd éventuellement et, même quand on voudrait atteindre l’élégance, crypté et hermétique. Dans un cours, c’est l’inverse : on veut expliquer des thèmes et des textes difficiles à des encore jeunes gens, qui manquent souvent de bases suffisantes, sans manquer pourtant ni de talent, ni d’ambition.
Ceux en particulier qui préparent le difficile concours français de l’agrégation n’ont pas de temps à perdre et n’ont donc pas d’état d’âme : ils sélectionnent les cours qui paraissent à la rumeur publique les plus utiles, les plus informés et les plus nets. Ils imposent ainsi au professeur, qui se risque à donner le sien, l’épreuve de convaincre son auditoire et même de le garder jusqu’au terme dans l’amphithéâtre ― ce qui ne va pas de soi. Il faut donc à la fois maîtriser la question proposée, bien connaître les textes, et savoir les rendre intelligibles, donc les actualiser ― en recourant même aux exemples les plus inattendus. Bref, il faut respecter l’intelligence de ceux qu’on expose et l’intelligence de ceux à qui on les expose.