Monsieur Walser et la forêt

Auteur : Gonçalo M. Tavares
Editeur : Viviane Hamy

Comme Walser est content ! À peine ouvre-t-on la porte de sa maison - il le sent bien - que l’on pénètre dans un autre monde. Comme s’il ne s’agissait pas seulement d’un mouvement physique dans l’espace - avancer de deux pas - mais aussi d’un déplacement - bien plus intense - dans le temps. Entre le pied de derrière dont émane encore l’odeur de la terre et qui donne la sensation, en rien objective, mais qui existe bel et bien, qu’on est entouré de choses vivantes qu’on ne comprend pas complètement et qui ne nous comprennent pas - les éléments de la forêt -, entre ce pied de derrière et le pied de devant, qui a déjà franchi le pas de la porte, la distance parcourue ne doit pas se mesurer en centimètres mais en siècles, voire en millénaires. " Le Bairro est un quartier dans lequel cohabitent plusieurs messieurs. C’est, comme Gonçalo M. Tavares aime à le dire, une utopie qui rend hommage à d’illustres auteurs. Ici, c’est Monsieur Walser qui fait son entrée en scène. Voilà un drôle de personnage, solitaire en apparence, qui décide de faire construire sa maison au beau milieu de la forêt, quelque peu éloignée donc du fameux Bairro.

Cette nouvelle demeure, fruit d’acharnement et d’exigence, est le symbole même de la victoire de la civilisation, c’est le pouvoir de la technique sur la nature, un espace que l’humanité a conquis sur la forêt !

Seulement voilà, le jour de l’inauguration les choses vont se compliquer à mesure que l’on sonne à la porte... Alors que Monsieur Walser semble au comble de la félicité, ce sont les professionnels, au lieu des invités, qui font irruption dans la maison afin de réparer les robinets, les murs, les fenêtres, le parquet... Monsieur Walser, l’esthète qui ne comprend rien à la technique, voit sa maison toute neuve chambardée, envahie d’échafaudages et autres matériels. Les professionnels finissent alors par prendre la décision de dormir sur place, au vu de l’ampleur des dégâts. L’homme n’est jamais à l’abri du chaos et Monsieur Walser en fera bien vite l’amère expérience ! Ce nouveau petit livre offre une caricature divertissante de la figure de l’intellectuel souvent isolé des choses concrètes et éloigné du monde réel.

C’est encore un bijou d’humour que signe l’auteur portugais, Gonçalo M. Tavares, qui a obtenu le Prix du meilleur livre étranger 2011 pour Apprendre à prier à l’Ère de la Technique et le Prix littéraire des jeunes européens 2011, étudiants francophones pour Monsieur Kraus.

Titres du Bairro déjà parus aux Editions Viviane Hamy : Monsieur Valéry et la logique (2008), Monsieur Kraus et la politique (2009), Monsieur Calvino et la promenade (2009), Monsieur Brecht et le succès (2010).

Qui était Robert Walser ? Un écrivain suisse allemand (1878-1956). Il a écrit quelques romans (Les enfants Tanner, 1907), mais il est surtout reconnu comme un maître de la forme brève. " Miniaturiste par excellence ", comme disait de lui Stefan Zweig, il a publié des centaines de textes courts, dans la plupart desquels un homme jette un regard simple, presque enfantin, sur le monde qui l’entoure : les villes, les gens, les hasards, le quotidien, les choses, les riens. Ce maître de Kafka, cet auteur salué par les plus grands écrivains de son temps (Hesse, Mann, Zweig, Musil) comme leur égal, est d’une grande modernité. Son style, sans doute comme le personnage, est mélancolique mais narquois, indolent mais vivace. L’écriture est fine et précise, dense mais charmante, elle transfigure le monde.

10,50 €
Parution : Novembre 2011
48 pages
ISBN : 978-2-8785-8508-7
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