Philippe Lejeune
Editeur : Charles Moreau
Plus que l'histoire sainte, Lejeune peint la grâce Janséniste -celle qui même reçue en partage, doit encore se mériter pour devenir efficace. Durement conquise sur l'ombre infertile, la lumière immatérielle qui sourd de son oeuvre -si étrangère au court contingent du temps-ne capte les sens que pour élever l'âme. Les titres des toiles de Philippe Lejeune annoncent une thématique biblique, mais le sentiment qu'elles induisent relève d'un sacré plongeant aux sources de la Grèce antique. Les scènes les plus expressives surgissent de fonds cubistes ou nuagistes, comme si, préexistante à l'ouvre, la figuration s'était imposée à l'artiste au fur et à mesure de son travail. Les formes les plus précises semblent nées de l'apposition progressive des couleurs. Et c'est la succession invisible mais sensible de nombreux glacis recouverts d'un ultime vernis miroitant qui génère une profondeur étrange, attirante et impénétrable à la fois. Emblématique d'une recherche attachée à faire parvenir le tableau à un fragile point d'équilibre au-delà duquel il dissoudrait ses potentialités dans une évidence univoque, la gamme chromatique dont use le peintre est violente, presque blessante, lorsqu'elle pousse jusqu'à la stridence le bleu ou le violet, ou lorsqu'elle mène le jaune dans un faux soufre : ce qui frappe d'elle, c'est cependant sa transparence, sa légèreté, son envol poétique.