Le théâtre de l'effroi
Si le Faust de Goethe est la pièce la plus célèbre du théâtre allemand, le Wallenstein de Schiller est sans doute la plus grande. La première élève la légende noire d'un aventurier intellectuel du seizième siècle au rang de drame cosmique ; la seconde met en scène la destinée d'un condottiere de la guerre de Trente Ans, devenu généralissime des armées catholiques puis assassiné pour avoir fait ombrage au pouvoir impérial. Les deux oeuvres sont unies par des liens qu'une lecture croisée permet de renouer, mettant ainsi en lumière leur matrice commune, qui est l'effroi. A l'origine de cet effroi, il y a la résurgence de la barbarie qui a accompagné les bouleversements politiques dont Goethe et Schiller furent contemporains. Lorsque la raison n'est plus l'antithèse de la barbarie, mais son instrument même, comment l'humain reste-t-il possible ? Telle est la question lancinante que posent les deux monstres dramatiques de la scène allemande.