La place du sujet
Il fallait la parole d'un poète pour amener au jour l'originalité de du Panier, cette enclave marseillaise. Il fallait aimer ce quartier et les êtres qui y vivent. Ne pas s'attacher à ces traits qui le caractérisent parfois si outrancièrement. S'arracher aux anecdotes faciles. À la chronique.
Il fallait aimer sa vie, cet indicible qui donne son timbre à ce lieu. Ce quelque chose clans l'air. Là, à flotter. Comme une âme toute vibrante du désir de partir. De commencer vraiment ce qui s'appellerait vivre. Enfin !
Il fallait aussi l'heureuse collaboration avec le photographe Giney Ayme pour que loin de toute illustration redondante, le jeu entre les images et les textes de Florence Pazzottu, son rythme ouvre un temps nouveau, celui de la tension entre hier et aujourd'hui, l'histoire et le présent. Ces textes sont des remontées au jour de notre commun langage d'émotions qui longtemps sont restées à mûrir au profond du corps. Grenades, ils s'ouvrent d'eux-mêmes. Ils sont leur propre clé. Il n'y a qu'à tourner les pages pour se sentir chez soi. À sa place, celle toujours mobile du sujet qui en nous cherche à aimer. Envers et contre tout.
Entre eux, un ton de vie s'inscrit entre douceur et violence, cette fraîcheur d'une explosion possible.
Entre eux, un quartier se lève fait de tous les désirs que la misère exacerbe, tensions tissées d'attente, celle de tous les départs. Et si c'était là que se trouvait la place du sujet: être voué à la case vide à partir de quoi aimer est possible ? Ce qui contribue à donner à ce livre sa dimension politique.