Rue des absents
À la terrasse du Café Russe, ma parano confortée par les derniers évènements se déployait. Elle prenait toute la place. À peine assise, j'ai eu l'impression que tout le monde me regardait. Ma tasse à la main, ratatinée sur le siège pour échapper aux regards, je fixais les Pyrénées. Seule une bâtisse, sans doute un château, témoignait de la présence humaine. Plantée sur les coteaux de Jurançon, cette demeure me renvoyait à ma propre solitude. Mais la solitude ne me faisait pas peur : on se fréquentait depuis longtemps.
Ma trouille était celle d'être une marionnette entre les mains d'une bande de fous furieux. Et le marionnettiste jamais très loin. Ça pouvait être n'importe qui. Ce type avec l'oreillette qui pianotait sur son iMac ? Le gérant du café ? Le jardinier arrosant les palmiers ? Ce vieux qui promenait son chien ? Peut-être même le chien ?
Que vas-tu devenir ma p'tite Véro ? Face à des merdes classiques, je pouvais râler, me révolter, prendre une décision ou ne pas en prendre. Sur ce coup-là, j'étais coincée. Engluée dans une histoire qui me dépassait complètement.
Il y a des cauchemars qui perdurent et des réveils si terrifiants qu'il vaudrait mieux ne pas ouvrir les yeux...
Les lieux défilent, les décors ne changent pas : Biarritz, Montreuil, Lausanne, Toulouse, et Pau, qui porte fièrement son slogan de « vie rêvée des villes ».
Va parler de la vie rêvée à Véro... Une seule idée l'obsède : sa peau !