604 800s
Editeur : Editions P
604 800. Ce chiffre orne un rocher d'une tonne. Ce rocher repose sur le sol de la librairie Histoire de l'oeil, à Marseille. Sous le rocher, un trou. Un trou de 1 m 70 de hauteur sur 60 cm de diamètre. À l'intérieur du trou : Abraham Poincheval. Il passera sept jours, soit 604 800 secondes, dans ces conditions. L'action est simple, évidente. S'enfouir dans le sol, sous la ville, avec un paquetage scrupuleusement préparé, ce n'est pas oeuvre de lunatique, mais d'explorateur, et de cryptologue. Poincheval a emmené cinq livres et il lit, dans son tombeau temporaire. Est-il un nouvel Axel Lidenbrock (le héros de Jules Verne part sous terre pour répondre à l'incitation d'un livre) ? Eh non ! Poincheval est (cette fois) un voyageur immobile. Son action est oeuvre mais tout autant expérience, autant physique que mentale : dans ce caveau l'homme vit ses limites spatiales et temporelles d'une façon inédite, a un nouveau rapport à sa mémoire et au livre ; il est enterré vivant. Le livre qui témoigne de cette expérience manifeste les implications de ce geste artistique. Les matériaux, la roche, les excavations, tout ce lexique évoque l'archéologue. Poincheval pointe dans cette direction, dans les illustrations qu'il agglomère autour de l'évènement. Tous ces éléments entrent en relations, pour nous faire saisir son acte autrement. Ainsi, un crâne humain porte en son centre un trou circulaire, écho de son antre. Nathalie Quintane témoigne, dans son court texte présent dans l'ouvrage consacrée au projet. Elle entame un dialogue muet avec l'artiste, sensible à son expérience de lecture.