L'ultime parade de Bohumil Hrabal
Un hommage et une invitation à lire l'écrivain tchèque Bohumil Hrabal.
Bohumil Hrabal est l'un des grands écrivains tchèques de la seconde moitié du XXe siècle. De son chef d'oeuvre, Une trop bruyante solitude, l'auteur disait qu'il n'était venu au monde que pour l'écrire.
On suit l'homme et l'écrivain au fil de ses périples de Brno (en Moravie) où il est né en 1914, passant son enfance dans la brasserie familiale, jusqu'à Prague où il fréquentait assidûment Le Tigre d'or, café désormais légendaire, très animé, qui lui servait tout à la fois de quartier général et de refuge pour vivre le moins durement possible son exil intérieur.
Hrabal a choisi de ne pas quitter ce pays où il se sentait traqué et où ses livres étaient interdits. Une lutte incessante qu'il mène avec les armes qui sont les siennes : l'humour, la fantaisie, la palabre et la littérature.
« Hrabal n'imitait personne. Sa fusion du fantastique et du réel (du réel plébéien, ordinaire, concret), il l'a réalisée tout seul, d'une façon aussi poétique que drôle (surtout drôle : vous ne trouverez chez aucun autre romancier une pareille drôlerie). Hrabal est un des grands créateurs du roman moderne. » - Milan Kundera.
Hrabal est un malicieux. Un être généreux qui aime les autres, à commencer par ses compagnons de virées dans Prague (le peintre et graveur Vladimir Boudnik et le poète-philosophe Egon Bondy), et ceux qu'il a côtoyés au hasard des nombreux métiers qu'il a dû exercer en marge de son activité d'écrivain comme Monsieur Hanta - personnage principal d'Une trop bruyante solitude -, l'ancien athlète chargé de pilonner des quantités de livres et qui n'aura de cesse d'en sauver un maximum.
Célébrer Hrabal ne pouvait se concevoir sans évoquer son dernier voyage qu'il fit hors d'Europe centrale - une série de conférences aux États-Unis -, dont il juxtaposa ses souvenirs au récit des manifestations qu'il suivait alors de près, chaque jour à Prague, et qui allaient aboutir à la « Révolution de velours », en 1989.
Le livre se termine avec sa mort tragique un jour de février 1997 où l'écrivain chuta du cinquième étage de l'hôpital de Bulovka. Le soir même, et jusque tard dans la nuit, une longue veillée funèbre - avec bière et charcuterie à volonté pour mieux communier - fut improvisée au Tigre d'or. Ailleurs, d'autres le saluèrent en buvant tout aussi goulûment à la santé posthume du grand raconteur parti rejoindre son maître, Jaroslav Hašek, l'auteur du Brave Soldat Chvéïk.