Perdu dans un supermarché
Dans la nouvelle qui donne son titre au recueil, le narrateur entre dans un supermarché pour acheter "une bricole" - en fait, des lames de rasoir, parce qu'il a besoin de se raser, à moins que ce ne soit pour s'ouvrir les veines -, et il s'y perd... Les nouvelles de Svetislav Basara explorent une poétique de l'absurde. Elles nous entraînent sur un terrain littéraire singulier, foisonnant d'inventions et métaphysiquement hard, dans un monde où l'auteur, ses personnages et le lecteur évoluent tous ensemble et se rejoignent infailliblement devant le néant. Le néant qui s'appelle "château" chez Kafka, "supermarché" chez Basara. Kafka a fermé son château à ses héros, peut-être pour les préserver de la découverte qui les y attendait. Basara, téméraire, va jusqu'au bout, nous invite à le suivre pour nous montrer que ce qui nous attend à l'intérieur de son "château", c'est-à-dire de son supermarché, c'est bel et bien le néant.