Conte du Bidonville : La fille perdue
Dans Passes noires, publié aux éditions Les Allusifs en 2005, Giosuè Calaciura prêtait sa voix à Fiona, une prostituée noire de Palerme, porte-parole des esclaves contemporaines que sont ces jeunes femmes enfermées dans « les maisons d'Afrique ». Après avoir écrit ce roman, l'auteur italien s'est rendu en Ouganda pour parcourir à rebours le voyage de ces femmes et faire le récit de leur exil, de leur perte identitaire. La fille perdue est né de cette quête de l'origine qui a mené l'écrivain du Nord vers le Sud. Ce conte contemporain procède d'une narration éclatée, multiple. Le cadre de vie dans lequel évoluent les personnages, le bidonville de Makere III, est un espace fracturé par la coexistence de différentes langues et dialectes, l'anglais du colonisateur se déformant à travers ses usages métaphoriques. Le Sida s'incarne ainsi dans un personnage allégorique, Slim le maigre. L'histoire emblématique d'Henriette, figure résumant toute la misère de ces vies déracinées, inaugure le roman. Henriette est une orpheline qui s'éprend d'un garçon tout aussi misérable qu'elle. Alors que ce dernier meurt, la petite fille qu'elle a de lui disparaît mystérieusement. Commence pour Henriette une quête éperdue. Le réalisme de l'écriture côtoie dans ce texte poignant les attributs du conte ou de la légende. Comme tous les autres textes de Calaciura, l'écriture parvient à donner une idée très précise de la réalité tout en la transfigurant par l'écriture.