Décor Lafayette
Les grands magasins n'existent plus, réduits à des affiches, soldes, blanc, Saint-Valentin, Noël que les touristes chinois découvrent dans le métro, des flèches les guident jusqu'aux comptoirs où enfin quelqu'un les comprend, rez-de-chaussée caverne enclave voilà une coquille rassurante, droit devant voilà une hôtesse, rouge et velours, tapis soie verre, et cette femme-écrin, décor, paravent s'exprime dans leur langue, incarne dès l'entrée le chic, cette femme-secours envoie au monde entier les signes espérés (minceur, nez droit, cheveux qui tiennent seuls ou par la grâce du catogan), voilà les touristes moins inquiets, attendent, ils reçoivent de ses mains un sac, l'ouvrent voilà les instructions, coupole, ascenseur, escalier à l'assaut crie le guide. Ils obtempèrent. Les galeries Lafayette sont aujourd'hui réduite à la fonction de décor, une attraction touristique qui s'auto-caricature et à laquelle les Parisiens ne prêtent plus attention. Remontant la rue Lafayette, de son écriture à la fois précise et virtuose, Anne Savelli va rappeler peu à peu, par petites touches, par micro-fictions, ce que que représentent les grands magasins dans l'inconscient collectif. Lieux d'anecdotes pittoresques, de souvenirs communs, de désirs réels ou fabriqués.