Réinventer une utopie, le Off d'Avignon
Un chiffre résume la démesure du Off d'Avignon : 1 336. C'est le nombre de spectacles présentés chaque jour, pendant trois semaines, lors de la dernière édition. Cette profusion inouïe tient à la nature même de ce festival né voilà cinquante ans du geste de révolte d'un artiste avignonnais, André Benedetto, qui décida de jouer sa propre création en marge du prestigieux festival de Jean Vilar. Beaucoup l'imitèrent, toujours plus nombreux au fil du temps, dans un esprit d'abord libertaire puis en se pliant progressivement aux lois du marché... Dans le Off d'Avignon, vient qui veut, vient qui peut, car ce sont les artistes qui paient pour jouer. Comme dans un salon professionnel, le public en plus, ils cherchent à séduire les programmateurs venus de la France entière et à assurer la diffusion de leur spectacle, voire leur survie. Une chance pour certains, un miroir aux alouettes pour beaucoup, tant la concurrence entre compagnies est devenue féroce et le business omniprésent... Mais comment réformer un festival anarcho-capitaliste que personne ne dirige et dont personne ne contrôle la croissance débridée ? Comment y mettre en oeuvre des politiques culturelles au service des artistes ? Avant de tracer quelques pistes pour sortir de cette jungle, il fallait d'abord raconter la genèse de ce festival né d'une utopie, décrire ses mutations successives, rencontrer ses acteurs et comprendre les logiques qui s'y affrontent. Et pour la toute première fois, un ouvrage retrace cette histoire et tente de saisir le Off dans toute sa complexité, en le considérant non pas comme un appendice du In mais comme un phénomène unique en France.