Anthropologie de l'ordinaire : Une conversion du regard
Paru chez Anacharsis en 2011, Anthropologie de l'ordinaire s'est imposé comme un essai des plus radicaux dans l'entreprise de revitalisation de l'anthropologie et de sa réintroduction dans le débat public.
Fondé sur une critique des grandes théories classifictoires académiques, l'ouvrage dénonce les stratégies d'écriture qui refoulent les scories de l'enquête dans un hors-champ pour asseoir son autorité scientifique. Un procédé ici identifié comme une entreprise de « désinterlocution » des personnes observées. Au final, les livres ainsi obtenus cloisonnent des espaces étanches entre les « observés », les lecteurs et les anthropologues, ces derniers placés dans une position dominante, du reste non dépourvue de conséquences politiques.
C'est précisément à partir de ce hors-champs, de ce foisonnement de l'ordinaire, qu'Éric Chauvier propose de reconsidérer l'anthropologie, réajustant de la sorte ses enjeux à sa pratique.
Il ne s'agit plus ici d'extirper du terrain « l'essence de ce qui fait sens », mais de prendre acte des anomalies qui se font jour au cours de l'enquête, qui sont véritablement à la fois l'objet et la matière de l'enquête.
Le renversement de perspective est radical, qui revendique sur le terrain comme dans la production littéraire qui en découle un « appariement des consciences » entre anthropologues, lecteurs et observés, soit : la condition d'un apprentissage partagé.
Conçu comme une véritable « boîte à outils », Anthropologie de l'ordinaire. Une conversion du regard concerne toutes les sciences humaines.