Le Napoléon du crime

Auteur : Ben Macintyre
Editeur : Editions de Fallois

Ce livre écrit par l’auteur de L’Espion et le Traître raconte la vie extraordinaire d’un bandit de haut vol, Adam Worth (1844-1902).

Il naît en Allemagne en 1844. Sa famille émigre aux États-Unis quelques années plus tard. Les Worth sont misérables. Dans le quartier de la Petite Allemagne (Die kleine Deutschland) à New York où ils habiteront, le jeune Adam se trouvera au cœur de l’«École du crime», la meilleure du monde, pourrait-on dire. On y apprend méthodiquement l’art de percer les coffres-forts, de faire des faux billets, d’imiter les signatures. Bientôt l’usage de la nitroglycérine fera l’objet d’un enseignement particulier. Quand, après la guerre de Sécession, Adam Worth doit faire le choix d’une carrière, c’est pourvu d’un très solide bagage qu’il décide de vivre résolument en marge des lois.

Une devise: pas de violence : pour lui, seuls les imbéciles portent des armes quand ils aident la société, fondamentalement injuste, à «restituer»

Son intelligence et son audace vont faire immédiatement merveille. Il se constitue un réseau de collaborateurs dévoués et – pour la plupart – discrets.

Dans le dernier quart du XIXe siècle le nombre des banques ne cesse croître aux États-Unis. La profession choisie par Adam Worth et qu’il exerce sous divers pseudonymes ne connaît pas le chômage. Et les fabricants de coffres-forts ont du mal à moderniser assez rapidement leurs prototypes pour mettre en échec les monte-en-l’air.

Un haut fait d’armes (il dévalise proprement la Boylston National Bank de Boston) lui vaut une «exposition médiatique» inopportune. Il change de nom et de continent. Londres, Paris, la Belgique et l’Afrique du Sud (le pays des diamants…) lui permettront d’élargir son champ d’action. Il est bientôt à la tête d’une multinationale qu’il dirige avec fermeté mais sans violence. Il soigne sa façade mondaine ; sa mise, son élocution, sa prodigalité donnent l’image d’un gentleman victorien.

Parmi les exploits il faut signaler «l’enlèvement» en 1876 de la duchesse de Devonshire («Georgiana», pour ses admirateurs): il s’agit d’un tableau célèbre du grand portraitiste Gainsborough.

Il vivra vingt-cinq ans avec elle et ne la restituera avec la complicité de Pinkerton que quelque temps avant sa mort.

Il «tombera» en 1892 («le Waterloo de Worth», dit Macintyre) par la faute d’un collaborateur apeuré lors d’une banale affaire de fourgon postal en Belgique. Condamné à sept ans de prison, il sera libéré au bout de cinq ans.

De retour à Londres avec ses enfants, il reprend ses activités et meurt paisiblement dans son lit le 3 janvier 1902.

Son fils profitera d’un accord entre son père et Alan Pinkerton pour commencer une carrière de détective à la Pinkerton.

Adam Worth est enterré dans le cimetière de Highgate dans une fosse commune sous le nom de Henry J. Raymond. Une petite pierre tombale fut posée pour désigner son lieu de repos en 1997 par la Jewish American Society pour la préservation de son histoire.



«Napoléon du crime», prince de la pègre, etc. l’Agence Pinkerton, qui le suit longtemps à la trace sans pouvoir le démasquer, lui rendra un vibrant hommage.

Aucun superlatif n’est épargné par ses biographes.

Lorsqu’il inventera le personnage de Moriarty, Conan Doyle empruntera plus d’un trait à cette vivante légende. L’Étrange cas du Dr Jekyll et Mr Hyde (1886) n’est pas très éloigné du sien. Et notre Arsène Lupin national, qui possède sa dextérité et cultive lui aussi ses dehors mondains pourrait lui avoir – indirectement – emprunté plus d’un trait, s’il est vrai que Maurice Leblanc doit beaucoup à Sir Arthur Conan Doyle.

Le Napoléon du crime contient aussi un tableau de l’époque. On y voit vivre une foule de personnages pittoresques. Elle contient la matière de vingt romans.

Traduit de l’anglais par Pierre Guglielmina.
22,00 €
Parution : Janvier 2020
344 pages
ISBN : 979-1-0321-0236-7
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