Levez-vous du tombeau
Les poèmes de ce "livre" sont à l'image de son titre : enthousiastes, volontaires, énergiques et entraînants. Croyant la poésie capable de sauver le monde, l'auteur exhorte le lecteur à se soulever dans la joie au-dessus de ses fragilités et de ses craintes, en manifestant sa foi en une poésie qui "réconcilie le rêve et l'action, le rêve et la réalité" , comme l'écrivait Aimé Césaire à qui un vibrant hommage est rendu en épilogue. Qu'il passe de la célébration à l'exhortation ou entretienne des "dialogues intérieurs" avec des poètes étrangers et des villes traversées, c'est toujours la même voix qu'on entend, exaltée, militante, contagieuse et joliment maîtrisée.
Extrait
La corde de L’oIseau
L’aventure humaine toute
la pesante aventure humaine vaut-elle le chant inutile de l’oiseau qui éveille l’air
dans la fraîcheur d’un matin ?
Que restera-t-il du monde après le monde sinon par bonheur l’écho léger comme une soie du chant de l’oiseau
et de sa tranquille mansuétude ?
Ô la grande pauvreté du chant de l’oiseau aussi nu aussi frêle
que son aile donnée au vent !
ô cette pauvreté qui nous juge
et devant quoi les villes s’effondrent
a-t-on jamais vu un oiseau dormir ?
il vole ou il chante ou
il regarde immobile le temps traverser l’espace
il ne songe pas comme nous à la mort qui s’ensuit l’oiseau ne pense pas
il fait de la présence une chose simple une patience qui mûrit comme un fruit
l’oiseau jamais ne craint de perdre la lumière n’est-ce pas lui si un hiver la dérobe
qui franchira l’infini du ciel pour la retrouver ?
le secret de l’oiseau :
son vol ni son chant ne sont un métier ce sont des grâces consenties
et ce privilège :
il se nourrit de riens au ras du sol
lui qui connaît infiniment la hauteur
qu’est-ce donc que la poésie ? parole d’homme faite oiseau et dans cette parole montante essor de l’homme en lui-même au-dessus de lui-même
demeure entre la mort des feuilles et la flamme des soleils