Quand nos souvenirs viendront danser

Auteur : Virginie Grimaldi
Editeur : Fayard

« Lorsque nous avons emménagé impasse des Colibris, nous avions vingt ans, ça sentait la peinture fraîche et les projets, nous nous prêtions main-forte entre voisins en traversant les jardins non clôturés. Soixante-trois ans plus tard, les haies ont poussé, nos souvenirs sont accrochés aux murs et nous ne nous adressons la parole qu'en cas de nécessité absolue. Nous ne sommes plus que six : Anatole, Joséphine, Marius, Rosalie, Gustave et moi, Marceline. Quand le maire annonce qu'il va raser l'impasse nos maisons, nos mémoires, nos vies , nous oublions le passé pour nous allier et nous battre. Tous les coups sont permis : nous n'avons plus rien à perdre, et c'est plus excitant qu'une sieste devant Motus. » À travers le récit de leur combat et une plongée dans ses souvenirs, Marceline raconte une magnifique histoire d'amour, les secrets de toute une famille et la force des liens qui tissent une amitié.

Virginie Grimaldi s'est aujourd'hui imposée dans le paysage littéraire français et fait partie des dix romanciers français les plus lus en 2018 (palmarès Le Figaro : GFK). Ses romans, merveilles d'humanité, sont plébiscités par les lecteurs, en France comme à l'étranger.

18,50 €
Parution : Mai 2019
360 pages
ISBN : 978-2-2137-0983-3
Fiche consultée 30 fois

Extrait

Chapitre 1

C’est un lundi matin, à l’heure de Motus. Je suis en train de mixer les poireaux lorsqu’on frappe. Je ne me méfie pas, cela ne peut être que la factrice. Elle seule sait que nous avons désactivé la sonnette pour éconduire les vendeurs de véranda ou de religion. J’essuie mes mains sur mon tablier et ouvre la porte en grand. De l’autre côté, le visage rubicond de Gustave me sourit.
– Que voulez-vous ?
– Toujours aussi aimable, Marceline.
– Je m’entraîne beaucoup.
– Je me serais bien passé de cette visite, figurez-vous. Mais il arrive une catastrophe qui nous concerne tous.
J’envisage de lui claquer la porte au nez, mais ma curiosité est appâtée.
– Je vous écoute.
Le voisin enfile son visage d’annonce de fin du monde et se penche à mon oreille, sans doute pour que les merles ne nous entendent pas.
Son visage n’avait pas tort. La fin de notre monde est proche.

Une fois Gustave parti, mes mains finissent de préparer la soupe, mais mon esprit est ailleurs.
L’impasse des Colibris est un appendice que seuls les riverains empruntent. On y trouve six maisons, que leurs façades affublées d’une porte et de deux fenêtres font ressembler à des visages stoïques. Derrière ces murs, il y a des vies.
Celle de Gustave au 2.
Celle de Rosalie au 3.
Celle de Joséphine au 4.
Celle de Marius au 5.
La 6 est vide.
Celle d’Anatole et moi au 1.
Nos vies habitent impasse des Colibris depuis soixante-trois ans.

Anatole est penché sur ses mots fléchés.
Depuis quelques jours, sa main droite commence à se raidir. Il en plaisante : la gauche va enfin avoir une utilité, après une vie passée dans l’ombre de sa rivale.
Je me force à sourire à chaque fois qu’il essaie de dédramatiser, mais pas ce midi. Mon mari s’en aperçoit.
– Gustave t’a contrariée ?
– Gustave contrarie son miroir, alors tu sais…
– Que voulait-il ? Il y a des années qu’il n’a pas mis les pieds ici, il devait avoir une bonne raison.
J’hésite. Je crains que la nouvelle n’aggrave son état. Mais son regard ne me laisse pas le choix. Je pose le bol de potage devant lui et emprunte un ton détaché :
– Ils vont raser l’impasse des Colibris.

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