Histoires des médias
Une histoire de l'information et de ceux qui la font des origines à nos jours, et jusqu'aux enjeux de demain.
Présentation de l'éditeur
« Depuis toujours, l’homme a besoin de savoir ce qui le menace, ce qui nuit aux autres ou les sert. Et pendant longtemps, seule une poignée de puissants, souverains, religieux, marchands, ont eu le monopole de l’information, de sa fabrication à sa circulation. Une information libre, diffusée par des médias accessibles à tous et établie par des professionnels cherchant la vérité est le fruit d’une histoire récente, inattendue, fascinante. Et elle est à présent terriblement menacée.
Comment distinguer le vrai du faux, l’information de la distraction ? Quel rapport entre informer, convaincre, enseigner, distraire ? Comment la démocratie résistera-t-elle aux formes de censure et de surveillance ? En quoi le déluge actuel et à venir d’informations, vraies ou fausses, influera-t-il sur notre façon de gérer les grands problèmes d’aujourd’hui et de demain ? Les réseaux sociaux, outils de surveillance généralisée, qui font de chacun le journaliste de lui-même, seront-ils balayés par une vague technologique plus puissante ? Les journalistes seront-ils remplacés par des automates ou resteront-ils des acteurs irremplaçables de la démocratie ?
Tels sont les sujets de ce livre. Encore une fois, comme pour tous les autres domaines dont j’ai tenté jusqu’ici de prévoir le devenir, celui des médias, vertigineux, ne peut être imaginé et maîtrisé qu’en remontant très loin dans son histoire, ou plutôt ses histoires. Ses passionnantes histoires. »
J. A.
Extrait
Introduction
De quoi informer est-il le nom ? Quel rapport entre informer, convaincre, enseigner, distraire ? Qu’est-ce que la pandémie actuelle a changé aux manières d’informer ? Comment maîtriser les flux de rumeurs et de fausses nouvelles ? Quels médias survivront à la crise actuelle ? Quand a-t-on commencé à s’informer et comment ? Qui a publié le premier journal ? Qui est le premier journaliste ? Existera-t-il encore des journaux, des radios, des télévisions, des réseaux sociaux, des journalistes en 2050 ? Et en 2100 ? Saura-t-on encore distinguer le vrai du faux ? L’information de la distraction ? À quoi servira-t-il d’être informé, si c’est pour fournir à d’autres les moyens de nous surveiller ? En quoi le déluge actuel et à venir d’informations, vraies ou fausses, influera-t-il sur notre façon de gérer les grands problèmes d’aujourd’hui et de demain ? La démocratie résistera-t-elle aux multiples formes de censure et de surveillance, et aux avalanches de contrevérités qui déferlent et déferleront sur le monde ? Continuera-t-on, dans certains pays, de faire du journalisme une activité suspecte, à placer sous surveillance ?
Les réseaux sociaux seront-ils remplacés par une autre vague technologique encore plus puissante ? Qui possédera les médias demain ? Aura-t-on plus de moyens d’être bien informés, de partager les savoirs, de mettre en commun les multiples outils de lutte contre le mensonge ? Les journalistes seront-ils tous remplacés par des automates, ou resteront-ils des acteurs irremplaçables de la démocratie, des garants de la vérité ? Chacun aura-t-il accès à l’infinité des hologrammes des autres ? Communiquera-t-on un jour directement par la pensée ? Pourra-t-on, un jour, transmettre à autrui sa propre conscience de soi ? Comment se servir des technologies à venir pour comprendre le monde, dire le vrai, s’unir, agir, ne pas subir de nouvelles oppressions et conquérir de nouvelles libertés ?
Depuis toujours, l’homme a besoin de savoir ce qui le menace, ce qui nuit aux autres ou les sert.
Lors des premières centaines de millénaires de leur histoire, la quasi-totalité des humains n’ont accès qu’aux informations qu’ils peuvent apprendre par leur famille, leur tribu, leurs visiteurs, leurs envahisseurs et par la nature environnante. Plus récemment, ils commencent à être informés par les dirigeants civils, militaires et religieux des empires dont leurs villages font partie, et qui leur imposent lois et récits.
Durant très longtemps encore, l’information, celle des puissants comme celle des peuples, voyage au pas de l’homme ; parfois à la vitesse des signaux de fumée. Puis, certains peuples apprennent à transmettre des informations plus précises, grâce à l’écriture, puis, plus rapidement, grâce au galop d’un cheval.
Pendant encore trois millénaires, on se contente, pour communiquer, d’envoyer des signaux, de dire, de crier, de chanter, de faire de la musique, d’écrire, de graver sur la pierre, le tissu, le roseau. Les informations les plus précieuses circulent confidentiellement entre les princes, les généraux, les religieux et les marchands. De fait, pendant très longtemps encore, l’histoire de l’information ne se distingue pas de celle du courrier : les seuls messages qui circulent sont des messages privés, que leurs récipiendaires peuvent ensuite choisir de partager ou de garder pour eux ; la communication écrite reste réservée aux puissants, qui font ensuite connaître leurs ordres aux peuples. Par des écrits, ou des cris. Depuis toujours, il leur faut mentir, dissimuler, manipuler, pour durer.