Les Records de l'histoire
L’histoire est une source d’inspiration inépuisable. Stéphane Bern nous surprend une fois encore par son approche exploratrice des événements qui jalonnent les siècles.
Combien de temps a duré le mariage royal le plus bref ? Quelle reine de France a eu le plus grand nombre d’enfants ? Quel est le plus vieux restaurant de Paris ? Quelle est la plus grande grève qui a eu lieu en France ? Quel roi a eu le plus grand nombre de conquêtes amoureuses ? Qui est l’écrivain le plus lu au monde ?
100 records de l’Histoire : culture, politique, secrets amoureux… un vrai Guinness de l’Histoire !
Extrait
En cet après-midi d’août 1590, toutes les cloches de Rome sonnent à la volée. C’est fort rare, mais l’événement est d’importance : alors que la cité est assaillie par un orage formidable, le pape Sixte V vient de fermer les yeux. Ainsi s’achève un règne qui n’aura duré que cinq ans, mais au cours duquel celui que l’on surnomme le « pape bâtisseur » aura eu le temps de mener à bien d’importants travaux. Cinq ans, c’est peu comparé aux règnes des souverains de l’époque. Rendez-vous compte : la « Reine vierge », Élisabeth Ire d’Angleterre a, quant à elle, régné plus de quarante- quatre ans !
Oui, cinq ans, c’est peu... mais il est un autre pape qui a fait encore mieux – ou moins, c’est selon ! Ce pape recordman, c’est justement le successeur direct de Sixte V : Urbain VII. Lui n’aura été à la tête du Saint- Siège que... treize jours ! À croire que la foudre ayant frappé le Vatican à la mort de Sixte V était prémonitoire du passage « éclair » de celui qui devait lui succéder...
Moins d’un mois après que Sixte V a rendu son dernier soupir, l’assemblée de cardinaux élit Giovanni Battista Castagna, qui devient donc Urbain VII. Né en 1521 à Rome, ce descendant d’une famille de la noblesse génoise étudie le droit dans de prestigieuses universités. Réputé pour son talent d’administrateur, il est d’abord choisi pour être nonce, une
sorte d’ambassadeur chargé de représenter le pape près les cours européennes.
C’est à l’âge de 69 ans, et fort de toute son expérience accumulée, que Castagna devient Urbain VII. Fidèle à sa réputation d’homme charitable, il fait établir une liste des pauvres de Rome afin de leur porter secours et rembourse les dettes de tous les monts-de-piété. Le constat s’impose : le peuple ne mange pas à sa faim. C’est alors qu’une idée lui vient à l’esprit : faire plus de pain pour manger plus ! Ainsi intime-t-il à tous les boulangers de produire plus, s’engageant à payer de sa poche les possibles pertes. Résultat : du pain moins cher et pour tous ! Et puis, afin d’offrir aux pauvres un emploi, il ordonne la poursuite des travaux initiés par son prédécesseur, à qui l’on doit entre autres l’achèvement de la basilique Saint-Pierre de Rome.
Que d’idées, que de projets ! Malheureusement, ce beau programme tourne court : le pauvre Urbain VII meurt subitement, peu avant minuit, la veille de son intronisation... Quelle est la cause de ce décès si soudain, me demanderez-vous ? Un rival qui convoitait le trône pontifical ? Des nantis qui voyaient d’un mauvais œil les mesures prises en faveur des plus démunis ? La réalité est moins romanesque. Urbain VII avait en fait contracté le paludisme et mourra donc seulement treize jours après le vote de l’assemblée... Mauvaise pioche pour les cardinaux !
Toujours est-il qu’en plus de détenir le record du pontificat le plus court, Urbain VII peut s’enorgueillir d’un autre record : on lui doit la plus vieille interdiction connue de fumer dans un lieu public (dans les églises en l’occurrence !). À l’heure où il est interdit d’allumer une cigarette dans tous les lieux publics couverts, on peut dire que les idées d’Urbain VII ont fait long feu