Simón
Ce livre est le roman d’une vie. Celle de Simón, au rythme de Barcelone. Le petit garçon fait ses premiers pas dans le bar familial, son cousin Rico le prenant sous son aile et lui faisant voir le monde sous l’angle du merveilleux. Mais un jour, Rico disparaît. Simón doit alors se confronter à la réalité, et grandir. Et si l’existence qu’il avait menée jusqu’à présent n’était qu’un leurre ? S’il s’était perdu dans les artifices habilement mis en scène par son cousin ? Peut-être est-il aujourd’hui prêt à recommencer de zéro, cette fois-ci pour de bon… avec le roman de sa vie. La sienne, enfin.
Au cœur d’une Barcelone (é)mouvante, de la veille des Jeux olympiques d’été de 1992 jusqu’au printemps 2018, en passant par les attentats des Ramblas, le lecteur suit une génération entière racontée à travers ce personnage candide, charismatique et amoureux, à la fois Petit Prince et jeune Quichotte des temps modernes. Dans ce formidable roman d’aventures, l’auteur questionne notre rapport, si mystérieux, à la fiction depuis l’enfance.
Extrait
À la fin, tu vas pleurer.
En attendant, ferme les yeux. Ou plutôt, comme dans le jeu : “Simón a dit ferme les yeux.” Alors tu les fermes.
À force de mentir, on finirait par y croire. Par exemple, comment tu dors, toi ? Tu dois éteindre ta lampe, fermer les yeux, faire semblant de dormir et te mentir à toi-même, faire comme si... jusqu’à ce que, paf, tu t’endormes. Et te voilà en plein sommeil. Peu de gens en ont conscience.
Tu veux voir les étoiles ? Simón a dit qu’il veut voir les étoiles ?
Frotte-toi les yeux, mais ne les ouvre pas. Garde-les fermés, Simón. Les gens ferment les yeux quand ils font un vœu, et toi tu veux voir les étoiles. Frotte-les encore un peu. Comme ça.
Voyons, réfléchis : si tu pouvais demander quelque chose, tu demanderais quoi ? Une sucette ? Tu en as déjà une. Autre chose. Allons, ce n’est pas si difficile. Deux sucettes ? Tu es comme cette Africaine, très pauvre, à qui on demandait ce qu’elle aimerait avoir. Elle répondit une vache. On insista : ce que tu veux vraiment. Je veux une vache. D’accord, mais si tu avais déjà une vache, que demanderais-tu ? Et elle répondit : deux vaches. Tu sais pourquoi ? Parce qu’elle était incapable d’imaginer autre chose. On ne lui avait pas appris. Elle n’avait pas les moyens d’exercer son droit de souhaiter. Oui, le droit de souhaiter, parce que, les souhaits, on ne les accorde pas, on les invente et on les conquiert. Maintenant, dis-moi : tu demandes quoi ? Que me demandes-tu, Simón ? Si tu ne sais pas l’imaginer, tu n’auras jamais rien. Tu ne seras jamais quelqu’un.