Aux vagabonds, l'immensité

Auteur : Pierre Hanot
Editeur : Manufacture Livres
En deux mots...

Le 23 juillet 1961, Metz est à feu et à sang. C'est "la nuit des paras", une nuit où militaires et FLN s'opposent...Un roman qui raconte les petites histoires de la grande Histoire.

15,90 €
Parution : Mai 2020
224 pages
ISBN : 978-2-3588-7618-6
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Présentation de l'éditeur

Le 23 juillet 1961 est une nuit de représailles, une nuit où les chiens sont lâchés. On lui donnera plus tard le nom de «Nuit des paras».
Pendant quelques heures, Metz sera à feu et à sang, barbare. Parce que depuis des mois le FLN s'y organise. Parce que les paras s'ennuient et ont besoin d'action. Parce que la guerre d'Algérie résonne ici et que français et arabes s'observent avec méfiance dans un climat de tension raciale constante. Et cette nuit là se joue le destin des anonymes sur lesquels PIerre Hanot a décidé de se pencher. Il y a des espoirs et des déveines, des potes de chambrée, des conversations à l'usine, des soirées au dancing...Des petits riens qui font ces vies de 1961, bouleversées cette nuit-là par les coups de l'Histoire.

Extrait

Le médaillon

L’étroite vitrine du caboulot se refuse à laisser entrer l’été et pour que ses clients puissent jouir d’un soleil de juillet trop rare, le bistrotier a installé à l’extérieur trois tables rondes en ferraille empiétant sur la ruelle.
Hocine et quelques coreligionnaires s’y sont regroupés devant un café serré et à voix basse, les conversations vont bon train. Quand Hocine prend à son tour la parole, les autres l’écoutent sans l’interrompre : ici, il fait autorité, il est respecté, ou craint, par beaucoup, à raison.
Au premier abord pourtant, on le jugerait peu charpenté mais l’apparence est trompeuse, son corps longiligne est fait de muscles fermes et sans gras. Point de surcharge pondérale, il ne peut en être autrement tant le feu de la haine le brûle au quotidien, le délestant de toute pensée superflue, le nourrissant d’une seule résilience, venger la mort de Medhi, son père.
S’il s’égarait par malheur un instant dans sa quête, le contact du médaillon qu’il porte autour de son cou saurait le remettre dans le droit chemin. Il y conserve précieusement en relique la photo de son géniteur assassiné par la France en représailles des insurrections algériennes du 20 août 1955 dans le Constantinois : des milices armées, les paras et les légionnaires ont raflé plus d’un millier d’hommes, pour certains encore des gamins, et ils les ont parqués au stade municipal de Philippeville avant de les massacrer à la mitrailleuse.
Par miracle, Hocine a échappé au carnage et émigré depuis dans l’Hexagone, à l’anonymat impuni des tueurs de son père, il répond par son engagement clandestin au sein du FLN.
– Mais comment choisir entre ton mouvement et le MNA ? le questionne prudemment l’un de ses interlocuteurs, un barbu voûté.
– Le MNA ? Un ramassis de démagogues à la botte des colonialistes, sentencie Hocine. Malgré tout son baratin, Messali, leur leader historique, a décidé d’exclure l’option militaire. Débile de croire qu’on puisse obtenir quoi que ce soit en négociant avec les Français, seule l’action violente est payante ! Aucune mansuétude envers l’ennemi et leurs collabos, la haine appelle la haine, Inch’Allah.
Docilement, le barbu hoche la tête en signe d’approbation. Émettre la moindre des réserves n’est pas inscrit au programme. Ni souhaitable.

Informations sur le livre