Je préfère ne pas
Plus de quarante ans que ce joyeux sociologue impertinent se moque des travers de notre époque. Dans ce recueil très personnel, Alain Schifres, l’auteur des Parisiens et de Sympa, nous explique avec son mauvais esprit et ses belles humeurs comment résister à cette dure époque grâce à l’évitisme dont la règle d’or est : je préfère ne pas.
Extrait
Les attachées de presse vous cajolent comme un chaton et un beau matin se décollent de vous comme un Post-it : vous n’avez plus d’actualité. Il faut alors un tremblement de terre pour qu’elles donnent signe de vie : vous avez reçu le prix Nobel ou vous allez mourir. « C’est sûr que tu vas bien ? » m’a dit G. au téléphone. Je revois G., dix ans plus tôt, un genou à terre, me laçant mes chaussures, alors que j’attends, blindé de coke, de passer chez Bouvard. Les attachées de presse savent faire le double nœud. « Je pensais bien que c’était une connerie, a-t-elle ajouté, mais sait-on jamais. »
Je n’en revenais pas qu’elle m’appelle, ainsi que de vieux amis et des amis récents et des amis d’amis dont j’avais oublié qu’ils existaient. Tous avaient reçu un courriel disant qu’à la suite de ma dernière coloscopie, j’étais au bout de mes forces et, s’ils pouvaient m’envoyer un peu de fric pour tenter l’opération de la dernière chance, mais c’était à Singapour.
Vous savez quoi? J’avais honte.
Ces ordures tapies dans les recoins d’Internet sont des cafards, mais ils vous font renouer avec des tas de gens.